samedi 25 juillet 2009

Welcome to the club (?)



La question raciale semble relancée aux Etats-Unis avec l'arrestation du professeur Henry Louis Gates Jr., un éminent spécialiste à Harvard du racisme et de la ségrégation.

Gates, un vénérable monsieur de 58 ans, ayant du mal à ouvrir une porte difficile, se faisait aider par son chauffeur de taxi lorsqu'une dame du quartier qui passait par là les prit pour des cambrioleurs -a priori car ils étaient tous deux noirs. La police ainsi prévenue aurait ensuite brusqué Gates, et ce bien qu'il ait prouvé qu'il était chez lui, pour enfin l'amener au poste.

L'anecdote fait beaucoup de bruit aux Etats-Unis, notamment car Barack Obama lui-même a cru bon de souligner que la question raciale était encore très vivace en Amérique, déclarant notamment qu' "il n'était probablement pas nécessaire de passer des menottes à un homme d'âge mûr, qui se sert d'une canne et qui se trouve chez lui." Dans le New York Times ou ailleurs, chacun y va de son commentaire ou de sa petite expérience, souhaitant ainsi au professeur la "bienvenue au club" des hommes noirs estimant être victimes de discrimination (66% aux Etats-Unis).

La question centrale semble être de savoir ce qui s'est produit entre l'officier de police, le sergent James M. Crowley, et le professeur Henry Louis Gates Jr. durant les quelques minutes où ils sont restés seuls. Gates accuse Crowley de racisme, Crowley accuse Gates de comportement injurieux. Initialement, l'affaire semblait être une simple histoire de racisme policier. Mais le rapport de police et le témoignage du second policier (noir, incidemment) qu'il contient, présentent plutôt Gates comme acariâtre et hautain, refusant de coopérer ou de donner des informations justement parce qu'il était noir et professeur à Harvard. Le "vous ne savez pas à qui vous avez affaire" ne trompe pas, et laisse à penser qu'il ne s'agit peut-être pas que de racisme.

Entretemps Obama a quelque peu nuancé ses commentaires initiaux (qui décrivait tout de même la réaction de la police comme "stupide"), et appelé Crowley pour discuter de l'affaire. Au final, ce n'est pas tant l'anecdote qui a son importance que le bruit qu'elle a causé.

Car tout le monde semble s'être empressé d'interpréter, de commenter, de juger, comme si finalement cette polémique rassurait aussi. Pour les partisans de la tolérance ou de la justice sociale, il s'agit d'insister sur les progrès qu'il reste encore à faire après et malgré l'élection présidentielle. De manière générale, la couleur de peau a visiblement encore son rôle à jouer.

Sources:
The New York Times, 23 juillet 2009: "Obama Wades Into a Volatile Racial Issue".
Le Monde, 23 juillet 2009: "La mésaventure d'un professeur noir ravive la question raciale aux Etats-Unis".
The New York Times, 24 juillet 2009: "As Officers Face Heated Words, Their Tactics Vary".
The New York Times, 24 juillet 2009: "Welcome to the ‘Club’"".
Le Monde, 24 juillet 2009: Barack Obama ranime le débat sur la question raciale".