dimanche 29 juin 2008

Be Afraid! Because Paranoia is Patriotic

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Cette image symbolise à elle seule le débat sur les libertés individuelles causé par les politiques sécuritaires de l'administration Bush au lendemain du 11 septembre.

De fait, le terrorisme fait partie de ce qu'on appelle "les politiques de la peur" ("politics of fear"). L'argument sécuritaire permet aux politiciens d'assoir et de légitimer leur pouvoir sur les populations. Noam Chomsky écrira d'ailleurs qu'il s'agit là d'une technique utilisée depuis la nuit des temps pour garantir le contrôle des populations par les classes dominantes.
La question de l' "insécurité" ne joue-t-elle pas un rôle dans la politique française à l'occasion?

Un excellent documentaire de la BBC retrace l'histoire contemporaine de ces politiques de la peur. Voir l'article dédié sur leur site.

Le coup de tonnerre du 11 septembre

Pour commencer ce blog je vais commencer par publier des extraits de mes mémoires de master sous forme d'articles. Voici donc le premier de ce qui sera sans doute une longue série avec "9/11".

Le 11 septembre 2001 (est-il besoin de le rappeler?) a vu la pire attaque terroriste sur le sol américain. Attribué au réseau Al Qaeda (la base), cet attentat a fait 2,974 victimes et profondément bouleversé la politique américaine en ce début de 21ème siècle.

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Les conséquences sur la politique étrangère sont bien connues. De l'invasion de l'Afghanistan à celle de l'Irak, les attentats ont conduit à la formulation de ce qu'on connaît maintenant sous le nom de la "doctrine Bush" de préemption. Les Etats-Unis se réservent donc le droit d'agir militairement contre les terroristes et les états qui les soutiennent. Ils ont également permis une augmentation très conséquente du budget alloué à la défense, voulue depuis un certain temps par les néo-conservateurs.

Il faut comprendre que l'attentat à généré ce que Divina Frau-meigs (professeur à Paris III) a appelé un "changement de paradigme" : les débats politiques se sont orientés sur la sécurité des Etats-Unis, et les politiciens en ont fait un thème de campagne à part entière. La sécurité a conséquemment joué un rôle à part entière dans les élections présidentielles de 2004, ou le candidat démocrate John Kerry a été accusé d'être trop laxe ("soft") sur la question. Elle continue de jouer un rôle important dans les élections présidentielles de 2008.

En ce qui concerne la politique étrangère elle-même, il faut remonter à la fin de la Guerre Froide et au vide causé par l'effondrement de l'Union Soviétique en 1991. La disparition de leur rival a laissé les Etats-Unis en position d' "hyperpuissance" comme le dira Hubert Védrine. Mais avec l'Union Soviétique disparaît également la raison d'être de l'immense appareil militaire américain. Or la puissance militaire reste nécessaire aux yeux d'un grand nombre d'intellectuels, qui y voient un outil pour exercer une influence sur le monde. Pour faire un "nouveau siècle américain", il faut donc une raison légitime de maintenir des forces dans les régions clés du globe, notamment au Moyen-Orient, fournisseur premier de pétrole. Ce seront les réseaux terroristes et Al Qaeda.

Al Qaeda pose cependant un certain nombre de "problèmes" à cet égard qui ont souvent été soulignés. Tout d'abord les forces militaires ne sont pas le meilleur moyen de lutter contre la "nébuleuse islamique". Ensuite, Al Qaeda n'a rien d'une organisation à proprement parler: le terme désigne en fait l'ensemble des groupuscules cherchant à s'attaquer à l'Occident. Ce réseau n'est pas centralisé, mais formé de cellules multiples, chacune poursuivant des objectifs propres. Si les sources de financement sont souvent les mêmes, notamment l'Arabie Saoudite, on ne peut pas non plus y voir d'organisation centralisée. Al Qaeda est donc un nom donné à quelque chose qui n'existe pas "réellement", mais utilisé pour définir le mouvement terroriste islamiste dans son ensemble. Bien entendu, s'attaquer à un mouvement est pour ainsi dire impossible, et la "guerre contre le terrorisme" ("War on Terror") ne connaît à ce jour pas de succès mesurable.

Coté politique intérieure, le 11 septembre va également mener à des changements importants, renforcement des pouvoirs de la police et des services de renseignements notamment. Une grande partie de ce renforcement sera contenue dans plusieurs lois votées par le Congrès américain: par exemple le Patriot Act du 26 octobre 2001 et le Intelligence Reform Act de septembre 2004. Ces lois seront souvent accusées d'être liberticides par les défenseurs des droits individuels ("civil libertarians"). Elles donnent un droit de regard des autorités sur des informations à caractère hautement personnelles, avec entre autres les informations bancaires ou médicales des citoyens américains. La seconde va également créer un organisme central pour la sécurité du territoire américain le "National Intelligence Council" dirigé par un directeur du renseignement supervisant le travail de la CIA, du FBI, du Pentagone et les autres (nombreuses) agences de renseignement.

On n'insistera jamais assez sur le caractère profondément traumatique des attentats sur la population américaine. L'aspect hautement médiatisé de l'attaque, avec les images montrées en boucle à la télévision et le symbole de l'effondrement des tours de plus de quatre cents mètres. Tout cela contribue à une sensation toute nouvelle de vulnérabilité pour les citoyens des Etats-Unis. Ils découvrent également que leur mode de vie et leur idéologie attirent la haine d'une partie du monde. Pour autant, les attentats ne vont pas conduire aux interrogations qu'on aurait pu attendre sur les responsabilités de la première puissance mondiale vis-à-vis des populations les plus affectées par les politiques américaines. Au lendemain du 11 septembre ces interrogations sont même vues comme "anti-patriotiques" par les américains. C'est donc avant tout le choc et l'incompréhension qui priment devant l'ampleur de la tragédie, et une réponse musclée appuyée par les politiciens les plus conservateurs.

Pour l'impact immédiat des attentats, lire le passage qui suit. C'est un article en anglais (hélas), mais une traduction devrait voir le jour dans les mois à venir.
Voir le Fichier : 911.doc

Création

Bonjour et bienvenue!

Une fois n'est pas coutume, à la création il convient d'expliquer. En ces temps ou les blogs poussent un peu partout sur la toile pourquoi ajouter une voix de plus à la cacophonie ambiante?
Tout d'abord, le but premier de ce blog est de parler de mon travail, afin que mes proches puissent savoir pour quoi on me paye au juste, et comprendre un peu mieux ce qui peut me trotter dans la tête la plupart du temps. Ensuite, pour les quelques visiteurs qui auront le malheur de tomber dessus, il permettra (peut-être) d'avoir quelques clés utiles pour comprendre la civilisation des Etats-Unis. Enfin, ce sera pour moi l'occasion de matérialiser les pensées qui me traversent l'esprit à l'occasion, à la lecture du New York Times ou d'un livre particulièrement édifiant.

Pourquoi "We, the people..." ? En cherchant un titre, celui-ci s'est imposé de lui-même. Quels mots plus symboliques pour représenter la civilisation américaine, ses prétentions et ses paradoxes? Ce préambule à la Constitution américaine a d'ailleurs déjà été utilisé comme titre d'un livre par l'historien Howard Zinn pour les souligner. Je plagie donc l'idée, en promettant de ne pas en faire une habitude.

Jake