lundi 29 décembre 2008

2009, ou la remise à zéro de l'Histoire

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La fin de l'année approche à grand pas, et entre deux festins il convient comme toujours de faire le bilan de l'année écoulée, de considérer les erreurs commises et de se fixer des objectifs (résolutions) pour les prochains 365 jours. Il en est de même en Histoire, et l'année 2009 s'y prête à merveille.

Le 21ème siècle a commencé sur une note de triomphalisme américain, une apparente victoire du libéralisme économique et politique contre tous ses adversaires, et les prédictions de Fukuyama sur une "fin de l'Histoire", bien que radicalement optimistes, ne sonnaient pas encore complètement faux dans le contexte de début 2001.
Huit ans plus tard, et tout est à revoir. Après les attaques du 11 septembre les néo-conservateurs de l'administration Bush ont fait du terrorisme le nouvel ennemi à abattre et les islamistes sont les communistes d'aujourd'hui, un ennemi tant intérieur qu'extérieur pour les démocraties libérales. Une invasion "préventive" de l'Iraq plus tard et le prestige américain acquis à l'effondrement de l'URSS a volé en éclats, et le modèle occidental qu'on a voulu imposer de force au Moyen-Orient est apparu d'autant plus vulnérable, de telle sorte que Fukuyama a du renier les néo-conservateurs qui l'avaient porté aux nues. La crise économique de 2008 a achevé de sceller le sort de tout triomphalisme hâtif, montrant les limites d'une croissance basée sur l'endettement, la spéculation, et la confiance abusée. La mort toute récente de Samuel Huntington enfin, qui prédisait lui une division de l'humanité par les divisions culturelles (Le choc des civilisations), nous rappelle que l'économie a encore une importance toute relative quand on considère l'avenir du monde.

Avec l'élection d'Obama comme leader de la première puissance mondiale, une page paraît se tourner. En fait, c'est plutôt un recommencement. Certes, l'Occident a retrouvé une mesure de confiance envers les principes universels de l'idéologie américaine mais les années à venir de l'administration Obama seront aussi celles de la fin de la suprématie américaine et de l'émergence définitive de nouvelles puissances. Ce sera la résurgence du paradigme idéologique qu'on a cru enterré en 1991, la remise en question de la démocratie libérale par des idées qui, il faut bien l'avouer, ne sont jamais qu'une redécouverte du marxisme. En Asie ou en Amérique du Sud, le collectivisme sera sans doute préféré à l'individualisme acharné que l'on cherche encore à nous vendre en Europe. La prédominance mondiale de l'économie comme régulatrice des rapports sociaux ne sera pas, et ne sera sans doute jamais. Henry Kissinger dans le prestigieux The Economist, parle de la "fin de l'hubris" et annonce un pragmatisme forcé, un nouvel équilibre entre réalisme et idéalisme, entre la nécessité de la gestion étatique et l'utopie libérale. La "fin de l'hubris", c'est finalement la remise à sa place du capitalisme. Les conséquences en sont déjà prévisibles: renforcement de l'alter-mondialisme, une crédibilité accrue pour les critiques en tous genres du système établi, et peut-être même un peu d'originalité américaine.

Car est-ce vraiment Obama que l'on attend? Certes, il représente à lui tout seul un changement radical de voie pour les américains, mais est-ce vraiment pour cela que le monde le plébiscite?
Plus encore qu'une administration Démocrate digne de ce nom, c'est une reformulation des principes américains que l'on attend, une revitalisation d'une idéologie qui a, somme toute, échouée.
Car 1991 a peut-être vu l'échec d'une certaine forme de communisme totalitaire, mais 2008 ressemble fort à l'échec d'un certain libéralisme. Ainsi la roue tourne, et l'Histoire continue avec elle, remise à zéro l'espace d'un instant dans les bulles d'une coupe de champagne.

dimanche 28 décembre 2008

Les thèses de Chomsky en France

Dans la continuité des notes précédentes, il est à noter que les thèses de Chomsky sont largement reprises en France par quelques intellectuels fréquemment décriés, notamment Serge Halimi du Monde Diplomatique. Dans Les nouveaux chiens de garde, Halimi s'est notamment intéressé aux rapports entre les médias et le pouvoir en France.

samedi 20 décembre 2008

Chomsky & compagnie: la fabrique du consentement

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Un nouveau film-documentaire sur Chomsky va bientôt voir le jour. Ce film, intitulé "Chomsky & compagnie" porte comme d'autres avant lui sur la "fabrique du consentement".

La fabrique du consentement qu'est-ce que c'est? Il s'agit grosso modo des techniques de manipulation de masse utilisées par les gouvernements pour contrôler la population. Chomsky s'appuie pour ses analyses sur l'un des aspects des théories de Marx, qui décrivait toute société comme contrôlée par une élite qui avait intérêt à étouffer toute rébellion ou prise de pouvoir par la majorité. En d'autres termes, à travers l'histoire, toutes les sociétés, de l'Empire romain jusqu'à la République Française, sont dirigées par une minorité qui use de procédés bien établis pour conserver le pouvoir. De nos jours, ce contrôle de la pensée est exercé non pas par l'armée ou la police (comme dans les dictatures) mais par les médias et les écoles.

Cela pourrait ressembler à une théorie conspirationniste, mais nous en sommes loin. "La fabrique du consentement", ce sont les concensus et les idées reçues généralement admises par une population donnée. Il ne s'agit pas simplement de préjugés, mais bien d'idées généralement admises et jugées moralement acceptables par la majorité, autrement dit de l'évolution globale des mentalités dans un pays.

Un exemple probant pourrait être la perception des grévistes aux Etats-Unis ou en France. Durant la majeure partie du 2Oème siècle la grève a été largement décriée aux Etats-Unis pour des raisons idéologiques, et des massacres ont parfois eu lieu lorsque les syndicats ne cédaient par à la pression du gouvernement. La façon dont les grèves étaient (et sont) présentées dans la presse a eu tendance à montrer les grévistes comme fainéants ou trop exigeants.
Aujourd'hui la tendance est la même en France qu'aux Etats-Unis: les grèves sont désormais vues comme des "prises d'otages", et le service minimum est plébiscité par une majorité de français. Ce revirement de l'opinion s'explique entre autres par la manière dont les médias traitent l'actualité.
Lorsque le pouvoir parvient à transmettre un point de vue spécifique par l'intermédiaire des médias, c'est une fabrique du consentement.

De tels points de vue sont très difficiles à reconnaître, mais nous sommes chaque jour soumis à un ensemble d'informations dont nous remettons rarement en cause la nature. "La crise va nécessiter des sacrifices", "les fonctionnaires sont des fainéants", "le matériel occidental est de meilleur qualité que le matériel chinois", "l'avortement est une liberté pour les femmes", sont quelques exemples (au hasard) de points de vue typiquement français mais non partagés par les habitants d'autres pays, et qui méritent discussion. A bien y regarder, les informations elles-mêmes sont parfois sujettes à interprétation.

Ce qui est surtout colporté par les médias aujourd'hui, c'est un sentiment d'impuissance pour le citoyen lambda, qui croit son pouvoir ou son avis négligeable face à l'appareil politique. La population renonce donc largement à gérer son pays, et s'en remet intégralement aux élus, même si elle ne leur fait pas pleinement confiance quant à leur intégrité et leur efficacité. La démocratie s'en trouve donc affaiblie, et les élections perdent de leur poids, devenant largement symboliques.

Voir la fiche AlloCine

Voici une courte vidéo présentant la Fabrique du Consentement:

mardi 16 décembre 2008

Le retour de Marx

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"Marx contre-attaque". Non ce n'est pas le dernier film de science-fiction, mais bien le titre d'un article du dernier Monde Diplomatique sur la déroute du néolibéralisme économique.
La crise est une opportunité facile pour les gauchistes de tous poils de décréter le retour en force de leur maître à penser. Mais Marx est-il jamais vraiment parti? En dépit des efforts des néolibéraux pour imposer l'idée que ses thèses sont obsolètes, il demeurera l'un des penseurs les plus influents du 21ème siècle, comme il l'a été au 20ème.

Car Marx avant toute chose est méconnu, stigmatisé, caricaturé. On a retenu de lui la vision d'un monde où les pauvres et les riches s'opposent dans une lutte des classes permanente, une hiérarchie imposée où les oppressés sont destinés à renverser leurs oppresseurs et à instaurer une société véritablement égalitaire, solidaire, communiste. Mais loin d'être le coeur de sa pensée, la critique du capitalisme en était plutôt l'aboutissement.

Bien avant le Capital, Marx avait commencé comme philosophe, décrivant l'Homme comme dominé par ses conditions d'existence, sa pensée prisonnière de son époque et de la société dans laquelle il évolue. Ce matérialisme (dans le sens de l'influence du matériel sur l'esprit) rend les théories politiques ou économiques secondaires, car celles-ci ne sont que l'expression de visions différentes du monde, et dépendent de la vie de leur auteur. Marx résume ainsi les grands débats d'une société à l'opposition entre des intérêts personnels fort différents, aux rapports de force entre ce qu'on retiendra (à tort peut-être) comme étant des "classes". Mais le matérialisme de Marx va plus loin: il replace les idées et les actions dans un contexte, et crée un concept qu'on pourrait appeler "relativisme historique", dans le sens ou toute idée dépend de son époque historique. Ainsi non seulement les idées dominantes sont généralement celles des élites qui contrôlent le pouvoir à un moment donné (une idée reprise par Chomsky dans son travail sur les médias), mais les principes moraux eux-mêmes dépendent d'une époque et des conditions matérielles. Un déterminisme extrême en fait.

Si tout est relatif, comment peut-on donc construire une réflexion utile? Par la dialectique, répond Marx. La dialectique, une théorie d'Hegel, ou l'idée que des oppositions et des crises naissent de nouvelles idées. Le progrès peut donc naître des contradictions d'une époque et de ses modes de pensée.

On voit comment la pensée de Marx est en fait éloignée des simplifications qu'on a pu en faire. Pour Marx le capitalisme n'était qu'une contradiction de plus dans le sens ou son élévation au rang d'idéologie n'était dans l'intérêt que d'une minorité, et non un progrès social. Ironiquement, Marx passa aussi de nombreuses années à s'opposer aux communistes de son époque, à qui il reprochait un manque de rigueur dans les théories, et voyait d'un oeil sceptique l'égalitarisme forcé ; ce n'est que plus tard qu'il rejoindra l'Internationale, y voyant l'occasion de dépasser les contradictions de son siècle.

La contribution essentielle de Marx à la pensée humaine est donc qu'il faut pouvoir dépasser les intérêts personnels (les siens, mais aussi ceux des autres) pour réfléchir à des théories politiques ou économiques. C'est ici que les néolibéraux répondent que l'Homme, "loup pour l'homme" (1), en est bien incapable. Dans la pensée libérale, l'Homme est "un animal qui tient essentiellement ce qu'il est non du monde humain mais de ses gènes, un calculateur mû par son seul intérêt d'individu -Homo oeconomicus-, avec lequel n'est donc possible qu'une société de propriétaires privés en concurrence 'libre et non faussée'." (2)
Pour enterrer Marx pour de bon, il faudra donc prouver que l'Homme est fondamentalement égoïste, que les défauts de la société sont en fait les siens, et non l'inverse. On l'aura compris, Marx avait foi dans la nature humaine, et c'est finalement cette foi, plus encore que ses théories, que l'on a essayé de faire oublier. On a préféré le diaboliser, l'associer au socialisme de Staline et Mao, aux massacres et à la déshumanisation, ranger sa pensée à coté de celle de Franco ou Machiavel. Si Marx était vivant, il n'en serait certainement pas surpris: sa pensée ne fait pas bon ménage avec le pouvoir.

Alors que retenir du marxisme aujourd'hui? Tout d'abord, que la crise économique ne suffira pas à remettre en cause une vision négative de l'Homme qui a su s'imposer à la majorité, mais au contraire pourrait la renforcer. Ensuite, que le changement ne commence pas par la révolution, mais bien chez soi, devant son miroir. Car pour savoir choisir entre marxisme et néolibéralisme, il faudra savoir si l'on est loup ou agneau.

(1) Thomas Hobbes
(2) Marx contre-attaque, par le philosophe Lucien Sève. Le Monde Diplomatique, décembre 2008. Voir aussi La Richesse des Nations d'Adam Smith.

Et le petit peu de musique...

Lorsque les artistes font de la politique, cela donne rarement des critiques très profondes, mais elles ont toujours le mérite d'être mélodieuses...
Voici pour le petit brin de musique mensuel Pink qui s'attaque à W. Bush:

lundi 15 décembre 2008

Why the presidency is (not) imperial

J'ai eu l'occasion mercredi dernier d'assister à une conférence de George C. Edwards sur la présidence américaine intitulée "Why the presidency is not imperial".

L'argument principal d'Edwards est que le président des Etats-Unis doit composer avec le Congrès et a en général du mal à faire voter ses lois ou mesures, diminuant ainsi son pouvoir.
Certes. Pour autant, en ce qui concerne la politique étrangère, le président continue à voir le Congrès s'en remettre à lui pour la gestion de crise, un pouvoir non négligeable, surtout lorsqu'une crise devient permanente (au hasard, le terrorisme).

A mon sens, ce n'est pas parce qu'un pouvoir est assorti de contraintes qu'il en devient moins réel. Un président américain peut envoyer des troupes n'importe où dans le monde sans l'accord du Congrès dés qu'il en prend la décision. Ce pouvoir à lui seul suffit à rendre la présidence américaine "impériale", puisque seul le dirigeant d'un Empire planétaire peut l'exercer.

Il est cependant toujours utile de comprendre qu'un président est loin d'être tout puissant, et qu'il doit utiliser au mieux les opportunités de l'actualité pour maximiser son pouvoir. Un président peut aussi perdre toute son influence si l'opinion publique et le Congrès l'abandonnent. W. Bush est ainsi devenu un "lame-duck president", qui ne peut qu'attendre son remplaçant. Obama devra donc savoir ruser pour transformer la crise en une opportunité de maximiser son influence.

The "modern liberal (?) agenda" (suite)

Le premier plan de secours des grands constructeurs automobiles américains a finalement été refusé. Ce plan proposait "quelques dizaines" de milliards de dollars en prêts destinés à assurer la survie de General Motors et Chrysler. Un plan refusé par les sénateurs Républicains finalement.
Jusque là, pas de surprise: les Républicains sont idéologiquement supposés être opposés aux plans de sauvetages de l'Etat. Là où la surprise vient, c'est quand on s'aperçoit que les Républicains n'ont pas opposé le plan par conviction, mais pour détruire le syndicalisme américain.
Aux Etats-Unis, le Syndicalisme n'est pas toujours vu d'un bon oeil. Traditionnellement associés au socialisme, voir même à l'anarchisme, les syndicats sont plus rares qu'en Europe, mais aussi proportionnellement plus puissants, car comparables aux lobbies politiques qui ont de l'influence au Congrès. Aux Etats-Unis les grèves sont rares, et dans l'Histoire ont souvent été réprimées par les armes (disons le, il y a eu quelques massacres de grévistes). Les syndicats exercent donc leur influence par l'intermédiaire du parti Démocrate en général, et le soutien est mutuel.
Bien sûr, les syndicats des employés de l'automobile sont assez puissants. L'United Automobile Workers Union (U.A.W.) est donc une cible de choix pour les Républicains, qui ont blâmé le syndicat pour l'échec des négociations sur le plan de sauvetage. Comment? En exigeant des employés de l'automobile qu'ils acceptent des salaires plus bas, et qu'ils perdent certains de leurs avantages en sécurité sociale et retraites. Selon Paul Krugman, un mail aurait circulé chez les Républicains pour signaler là "l'opportunité de tirer le premier coup de feu contre les grands syndicats".

Non, on ne rêve pas. Lorsque l'économie va mal, lorsque la gestion des entreprises par le patronat s'avère désastreuse, les premiers à payer sont... les simples employés. Pour les Républicains, la crise est une opportunité pour effectuer un maximum de changements sociaux aux Etats-Unis. De manière générale, la crise est une aubaine pour les partis de droite (en Europe aussi) pour fusiller la sécurité sociale, les retraites ou les avantages divers et variés de ce qui fut surnommé le "prolétariat". A l'évidence, la lutte des classes n'est pas morte pour tout le monde. Alors... Qui a un agenda au juste?

mardi 9 décembre 2008

The "modern liberal agenda"

Il y a des moments où l'on ne peut pas s'empêcher d'avoir un petit sourire mesquin. Comme lorsque les PDG des "big three", les trois plus grands constructeurs automobiles américains, viennent quémander de l'argent pour se renflouer auprès du gouvernement, mais encore plus lorsqu'un néo-conservateur comme William Kristol se sent obligé de rappeler qu'en principe les conservateurs et les "big business" sont contre l'interventionnisme étatique.
"Le gouvernement n'est pas la solution à notre problème, le gouvernement est le problème", disait Ronald Reagan en 1981. Les conservateurs et les Républicains ont depuis largement continué dans la même veine, et Georges W. Bush n'a pas été le dernier à prétendre vouloir diminuer la taille du gouvernement américain.
A l'heure où Obama a annoncé un ambitieux programme de rénovation des infrastructures de son pays, la droite américaine se trouve désormais face à une impasse car pour sauver les plus grosses entreprises du pays ne reste plus que l'Etat. Derrière les critiques de Kristol, qui parle d'un "agenda" pour la gauche américaine et conseille encore d'attribuer les dollars à la modernisation de l'armée plutôt qu'à la rénovation des écoles *!*, se cache en fait un profond désespoir. Car maintenant que l'économie est en ruines et qu'un président Démocrate est prêt à investir la Maison-Blanche, il ne reste plus qu'à lui faire confiance, en espérant, non sans ironie, que les adversaires politiques d'hier seront maintenant dignes de confiance à la tête du pays.

lundi 24 novembre 2008

Intelligent Design

L' "Intelligent Design" (dessein intelligent en vf) est une reformulation du créationnisme s'appuyant sur des arguments scientifiques, pour reprendre son wikipedia, la thèse selon laquelle
certaines observations de l'univers et du monde du vivant sont mieux expliquées par une cause intelligente que par des processus aléatoires tels que la sélection naturelle.


La théorie du dessein intelligent sert avant tout à contourner le jugement de la Cour Suprême sur la séparation entre l'Eglise et l'Etat (Edwards v. Aguillard, 1987) en demandant à ce que le créationnisme soit enseigné à l'école comme une alternative viable à la théorie de l'évolution.

Cette théorie s'appuie sur deux arguments scientifiques:
- La complexité de certains organismes ou organes (irreducible complexity), qui ne peut s'expliquer par la seule sélection naturelle. L'idée est qu'une aile ou un oeil (ou la flagelle d'un organisme microscopique en l'occurrence) sont trop complexes pour avoir évolué "par hasard", et que l'évolution ne peut expliquer l'émergence simultanée des différents éléments les constituant.
- L'improbabilité mathématique des résultats de la sélection naturelle, autrement dit que la probabilité pour que des mutations aléatoires de l'ADN produisent des éléments complexes est trop faible pour qu'elles soient dues au seul hasard.

Les deux arguments ont bien sûr été réfutés. Il a été prouvé d'une part que des structures complexes peuvent tout à fait émerger par hasard, et que la faible probabilité de ces événements ne prouve en rien l'influence d'une intelligence supérieure.

De fait, le dessein intelligent s'appuie largement sur la méconnaissance de l'évolution par le grand public. Il est en effet facile de voir une improbabilité dans la complexité actuelle de la vie sur terre, et donc de conclure qu'une influence extérieure est nécessaire pour l'expliquer. Pourtant, si la sélection naturelle est difficile à appréhender au quotidien, l'impact de l'environnement sur de longues périodes et dans des conditions extrêmes est plus que prouvée par l'observation des fossiles. Il est parfois difficile de concevoir ce que la sélection naturelle donne sur plusieurs millénaires car la durée d'une vie humaine est relativement courte, et il faut en l'occurrence une certaine foi... en la science.

En parallèle, l'évolution a révolutionné la pensée en démontrant que les textes religieux ne pouvaient s'interpréter de façon littérale. Elle a également replacé l'émergence de l'être humain dans un contexte plus large, indépendant d'une intervention divine; en d'autres termes, l'homme a été réduit à son statut animal, perdant ainsi le caractère divin ("à l'image de Dieu") de la Bible.

Les Américains, par nature très croyants, ont tendance à voir la théorie du dessein intelligent d'un oeil favorable. Bush lui-même a déclaré que
les deux théories devraient être correctement enseignées [...] afin que les gens comprennent de quoi le débat retourne.

[Voir l'article du Washington Post sur ses remarques]

Pour l'heure, les tribunaux américains ont jugé que la méthode utilisée pour soutenir un dessein intelligent était trop biaisée pour que la théorie soit enseignée (Kitzmiller v. Dover Area School District, 2005). De fait, le raisonnement qui consiste à évoquer un "concepteur" lorsque la complexité de la vie paraît inexplicable s'appuie à l'évidence sur l'ignorance et la foi religieuse. Mais si cette attaque bien orchestrée contre la théorie de l'évolution démontre bien une chose, c'est la difficulté de faire admettre au grand public que les forces naturelles dépassent de loin notre entendement. Plus encore qu'un mouvement religieux, le "dessein intelligent" représente une tentative désespérée de revaloriser notre existence, de lui donner un sens plutôt que de l'attribuer au hasard de quelques mutations opportunes.

La BBC a résumé le sujet dans un documentaire intitulé Intelligent Design: A War on Science, visible sous YouTube.

Charles Darwin


Charles Darwin
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En 2009 nous fêterons les 200 ans de la naissance de Charles Darwin et les 150 ans de L'origine des espèces.
A cette occasion de nombreux colloques reviendront sur l'oeuvre de Darwin. J'en profite personnellement pour m'intéresser de près au créationnisme aux Etats-Unis, et à sa forme la plus récente, l' "Intelligent Design".
J'y reviens très vite!

samedi 22 novembre 2008

Le monde post-américain

Le déclinisme a toujours été à la mode. Paul Kennedy faisait déjà un tabac il y a plus de vingt ans de cela avec son fameux livre The Rise and Fall of the Great Powers: Economic Change and Military Conflict From 1500 to 2000, qui prédisait le proche déclin des Etats-Unis. Plus récemment, Obama a pris pour livre de chevet The Post-American World de Fareed Zakaria (je l'ai commandé il y a quelques jours -j'y reviendrais donc).

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Aujourd'hui Le Monde rapporte dans deux articles (ici et ) que le très sérieux National Intelligence Council enterre lui aussi la puissance américaine en décrivant un monde radicalement différent pour 2025.

En fait, les tendances soulignées par le NIC n'ont rien de nouveau et s'observent déjà aujourd'hui: le déclin de la puissance économique américaine, l'incapacité de ses forces militaires à gérer plusieurs zones d'intervention en même temps, le développement de "super-puissances régionales" (Brésil, Russie, Inde...), la domination économique de la Chine, la raréfaction de matières premières (notamment les hydrocarbures), l'instabilité continuelle du Moyen-Orient ou encore les crises environnementales liée au réchauffement climatique sont évidentes pour quiconque n'a pas vécu reclus au fond des bois ces dernières années.

Ce qui est intéressant en revanche dans cet énième rapport sur le sujet, ce n'est pas tant la description d'un monde de plus en plus multipolaire, que celui d'un monde sans puissance ni idéologie dominante, dans lequel les objectifs à court terme domineront le calendrier des nations les plus influentes. Du jamais vu pour ainsi dire, puisque jamais le monde n'aura été à la fois si unifié (par les technologies modernes de communication) et hétérogène (dans ses croyances et ses systèmes de gouvernement). Un monde inter-connecté par le web et interdépendant par les échanges économiques, mais sans "communauté internationale" à proprement parler, avec une foultitude d'acteurs aux buts fort différents, hautement instable par la diffusion de la force militaire -et nucléaire-, dans lequel les innovations technologiques auront une importance encore accrue et difficile à imaginer au jour d'aujourd'hui

Si ce monde vous est aussi familier qu'à moi c'est peut-être que nous avons eu les mêmes lectures et les mêmes références culturelles. Ce monde post-américain est depuis longtemps celui des livres, bandes dessinées, jeux vidéo et films de science-fiction décrivant le proche avenir, suffisamment instable et incertain pour être vulnérable aux idées les plus démentielles. Un monde où se côtoieront les entreprises les plus cyniques et les plus beaux espoirs. Un monde finalement dans lequel nous vivons déjà, sans le savoir.

Un peu d'humour (bis)



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Cela n'est pas récent, mais fait toujours sourire...

vendredi 21 novembre 2008

Un peu d'humour...

Parce qu'on pose souvent les mêmes questions aux doctorants...

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Cet excellent strip provient du site http://www.phdcomics.com/, qui me fait bien rire. Merci à Cécile du BDP3 pour la découverte...

mardi 18 novembre 2008

Dépasser la pensée libérale

En cette période de crise économique, le libéralisme est plus que jamais attaqué comme une idéologie défaillante. Sa prétention à assurer le développement économique est remise en question, cependant que son caractère inhumain reste souligné par l’extrême-gauche partisane de l’alter-mondialisation.
Pourtant, un rejet simple du libéralisme ne permet pas d’en comprendre les défaillances, encore moins d’apporter une alternative viable. Quelques rappels sont nécessaires.

Historiquement le libéralisme, en prônant l’émancipation de l’individu face à l’Etat, prétendait apporter une auto-régulation du tissu social par une hiérarchisation utilitaire plutôt qu’héréditaire. En politique, cela nous a mené à la démocratie représentative que l’on connaît aujourd’hui –à la suite d’un effacement de la monarchie et de l’aristocratie. En économie, cela se traduit par un recul de l’Etat et une privatisation des moyens de production. C’est l’échec de cet auto-régulation économique qui remet aujourd’hui en cause les principes fondateurs du libéralisme, appelant par la-même à dépasser la pensée libérale.

Un monde « post-libéral » est pourtant encore difficile à imaginer, tant ces principes idéologiques ont de manière parfois insidieuse infiltré l’opinion publique et les mentalités. Pour une majorité aujourd’hui, l’Etat doit se cantonner à un rôle de gestionnaire de l’ordre et de la sécurité publics. Même les partisans de l’Etat-providence n’imaginent pas dé-libéraliser les sphères politiques ou médiatiques ; la critique est donc dirigée contre le libéralisme économique, et c’est celui-ci qu’on désigne en France sous le nom générique de « libéralisme ».


Le libéralisme économique a-t-il échoué ? Question difficile s’il en est, puisqu’en un certain sens celui-ci n’a jamais existé. L’intervention étatique, même réduite à un minimum, est demeurée sous des formes diverses et variées, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis, grâce notamment aux Banques Centrales (Banque Centrale Européenne & FED), chargées de réguler les questions monétaires et bancaires. En un sens, la crise est donc l’échec des Banques Centrales à réguler correctement la création monétaire et la spéculation, plutôt que celui du libéralisme économique.

Oui mais. Cette spéculation, celle qui a engendré la crise dite des « subprimes », a eu lieu dans un univers économique qu’on peut qualifier de « virtuel », tant les valeurs sur lesquelles s’exerce le profit sont déconnectées de la valeur réelle des biens et des entreprises ainsi gérées (les points communs avec la crise de 1929 ne manquent donc pas). C’est cette virtualisation de l’économie, paradis des spéculateurs cyniques et intéressés, qui est aujourd’hui montrée du doigt ; on y voit une faille systémique du libéralisme qui encourage l’action individuelle et la dérégularisation. Le libéralisme n’est pas fautif en soi, c’est l’inéluctable spéculation qui en découle qui le condamne.


Il est cependant également possible de s’attaquer aux définitions qui sont au cœur même de l’idéologie libérale. En opposant l’individu à l’Etat, le libéralisme a rejeté les valeurs communautaires traditionnellement associées au socialisme telles que la solidarité sociale et l’égalitarisme doctrinaire. Dans cette idéologie, les rapports d’interdépendance et de cause à effet sont donc posés de manière arbitraire : l’Etat est décrit comme un acteur oppressant, aliénant les libertés individuelles. Un tel postulat demeure cependant vrai pour tout groupe ou toute société puisque –par définition- l’individu s’efface dans sa participation au groupe. La diabolisation de l’Etat dans la philosophie libérale ne se comprend que dans la perspective historique du siècle dernier ; elle est aujourd’hui largement obsolète car les relations d’aujourd’hui entre individu et Etat ne génèrent pas automatiquement d’aliénation.

Dans le domaine économique aussi, certains postulats de base du libéralisme gagnent à être remis en question. Ainsi, le discours le plus courant et le plus communément admis –y compris chez les anti-libéraux- consiste à présenter les mécanismes de solidarité sociale comme dépendants de prélèvements sur le secteur privé. En d’autres termes, on admet que l’éducation ou la santé sont financés par les impôts sur le revenu et sur les entreprises.
Une analyse économique pragmatique nous montre qu’il n’en est rien, et que de tels liens entre les secteurs privés et publics sont au mieux théoriques.

Toute activité économique est stimulée par la création monétaire, autrement dit par les crédits accordés aux investisseurs. L’argent ainsi investi pour la production de biens matériels n’a donc aucune valeur –de fait, aucune existence- avant la création desdits biens. Contrairement au schéma communément admis, l’offre précède toujours la demande ; les entreprises et les salaires qu’elles paient sont financés par la création monétaire avant d’être rentabilisés par la consommation. Or, l’idéologie libérale interdit la création monétaire a but non lucratif ; seul le profit peut justifier l’investissement. Les activités d’intérêt commun, souvent rentables mais rarement profitables, telles que l’éducation ou la santé, doivent donc expliquer leur financement par un autre mécanisme. La désignation de l’impôt comme source de financement public n’est donc possible que si l’on exclut préalablement l’idée que le service public profite également d’une création monétaire.

On voit comment la dépendance du secteur public est en fait créée de toutes pièces dans l’idéologie libérale. C’est pourtant un fait communément admis par la majorité, qui voit les activités d’intérêt public comme peu rentables, voir déficitaires. On ignore ainsi que le secteur privé est largement alimenté par des mécanismes le favorisant grandement, sans pour autant le rendre forcément rentable.

Dépasser la pensée libérale ne demande donc pas simplement une remise en question de la non-intervention étatique, mais une redéfinition de certains principes structurels de la société. L’idéologie libérale est apparue à une époque où l’aliénation des libertés individuelles n’avait rien de symbolique ; l’émancipation économique de l’individu était un moteur pour son émancipation politique (on sait à quel point les deux furent liés dans la démocratisation des pays européens). Aujourd’hui les deux libéralismes n’ont plus à être liés ; le libéralisme politique, pilier de la démocratie occidentale, n’interdit en rien un anti-libéralisme économique. Pour un libéralisme « à visage humain », peut-être suffit-il de cesser de favoriser les entreprises privées à but lucratif, et de revaloriser l’action sociale à but désintéressé. Si demain la création monétaire était réservée aux entreprises solidaires, on aurait non seulement dépassé la pensée libérale mais on l’aurait véritablement et durablement améliorée.

Pour cette note, je me dois de citer l’article de Jean-Marie Harribey dans Le Monde Diplomatique de novembre 2008 : Les vertus oubliées de l’activité non marchande.
J’en recommande chaudement la lecture !

Télécharger cette note: Voir le Fichier : liberalisme.doc

Libéralisme (n.m)

Libéralisme:
- Doctrine économique qui privilégie l'individu et sa liberté ainsi que le libre jeu des actions individuelles conduisant à l'intérêt général.
- Doctrine politique visant à limiter les pouvoirs de l'État au regard des libertés individuelles.
- Attitude de compréhension qui pousse à la tolérance : Faire preuve de libéralisme dans ses opinions.
Dans la religion protestante, équivalent du modernisme catholique.
Source: Larousse.fr

Au jour d'aujourd'hui les débats sur le libéralisme sont d'actualité, aux Etats-Unis comme en Europe. Le libéralisme, tant décrié en France, a pourtant des sources historiques fort honorables, puisque c'est grâce à lui que nous pouvons aujourd'hui exercer un pouvoir politique.

Obama s'est dit prêt à aggraver le déficit budgétaire (selon Le Monde), et visiblement il compte s'inspirer de Franklin D. Roosevelt pour combattre la crise. Selon le New York Times, Obama s'inspire des premiers cent jours de l'initiateur du New Deal pour sa propre prise de fonction.
Obama prêtera serment en tant que 44ème président le 20 janvier prochain et prononcera ensuite un discours inaugural devant le Capitole. J'aurais la chance d'y assister, et j'espère pouvoir vous rapporter quelques paroles historiques!
La grande question est de savoir dans quelle mesure le nouveau président prendra ses distances avec le libéralisme, autrement dit à quel point il usera d'interventions de l'Etat pour redresser l'économie.

Pour revenir au libéralisme, celui-ci a donc de multiples facettes, et ne peut être réduit à son aspect économique. Ironiquement, alors que l'on associe le libéralisme à l'économie en France, on l'associe aux valeurs morales aux Etats-Unis. Un "libéral" français tend donc à être "de droite", alors qu'un "liberal" américain tend à être "de gauche". C'est un faux-ami trompeur, surtout pour les étudiants!

lundi 17 novembre 2008

Exit Guantanamo & Irak

La page sera bel et bien tournée, puisque Bush n'attend même pas Obama pour lancer le retrait américain!

dimanche 16 novembre 2008

Hillary for State




Hillary Clinton est pressentie pour être nommée Secrétaire d'Etat par Barack Obama. Le Secrétariat d'Etat est l'équivalent de notre Ministère des Affaires Etrangères, à ceci près qu'il est plus prestigieux en raison de l'influence des Etats-Unis sur le monde.
Clinton et Obama se seraient rencontrés il y a quelques jours pour "discuter" du poste, ont rapporté des journalistes (le déplacement de Clinton a Chicago avec l'encadrement par les services secrets est resté peu discret). L'entretien a ensuite été confirmé par les intéressés.

Ce geste d'ouverture envers son adversaire malheureux est ardemment discuté dans les hautes sphères de Washington. Certains y voient une manoeuvre politique d'Obama destinée à rassembler les Démocrates autour de son administration, mais éloignée de ses promesses de campagne pour une "rupture" avec les administrations précédentes. La question étant de savoir s'il pourra "contrôler" des personnalités politiques d'envergure telles que Clinton et mener à bien une réelle politique du changement.

Obama a également affirmé dans une interview pour "60 minutes", le programme phare de CBS, qu'il nommerait un Républicain à un poste d'envergure, confirmant ainsi une volonté d'ouverture et de rassemblement.

mercredi 5 novembre 2008

Petite analyse

S'il se trouve encore quelqu'un pour douter que l'Amérique est un endroit où tout est possible, qui se demande encore si le rêve de nos fondateurs est vivant à notre époque, qui questionne encore le pouvoir de la démocratie, ce soir est votre réponse.

If there is anyone out there who still doubts that America is a place where all things are possible, who still wonders if the dream of our founders is alive in our time, who still questions the power of our democracy, tonight is your answer.

President-elect Barack Obama



Discours du président Obama le soir de l'élection:




Les résultats

Voir Le Site du Monde

Une fois qu'on les regarde de près, le "raz-de-marée" concerne surtout les résultats électoraux. Par 338 grands électeurs à 161 (un résultat qui évoluera encore un tout petit peu), Obama est élu président. Mais le vote populaire n'est qu'à 52% pour lui (contre 47% pour McCain). C'est là un paradoxe politique courant aux Etats-Unis: un président peut gagner largement (la victoire d'Obama dispose environ de la même marge que celle de Theodore Roosevelt), mais sans pour autant disposer d'une majorité populaire derrière lui.
Sans surprise, McCain a raflé la majorité des votes des personnes âgées et des évangélistes, tandis qu'Obama a dominé chez les femmes, les hispaniques, et les noirs (à 95% pour ce dernier cas). L'élection se démarque également par une participation importante, ce qui a probablement joué pour les démocrates.
On note aussi la prudence des médias américains cette fois-ci quant au résultat de l'élection, puisqu'ils ont attendu 23h00 (heure de la côte est) pour donner Obama gagnant.


La campagne


Au final, Obama remporte confortablement l'élection, chose extraordinaire quand on pense à ses débuts difficiles face à Hillary Clinton. Plusieurs choses ont censément joué en sa faveur. Tout d'abord une campagne organisée de main de maître, calquée sur la campagne de 2004 de Bush, disposant de moyens importants (pour une fois les démocrates ont dominé les médias), s'appuyant largement sur les nouvelles technologies et menée par un grand orateur charismatique.
Ensuite, le contexte: après le désastre de l'administration Bush, les démocrates avaient un léger avantage à exploiter, et ce quel(le) que soit leur candidat. Mais la crise a joué aussi immensément, en éloignant l'attention de la politique étrangère et du terrorisme. Etant donnée l'inexpérience d'Obama dans le premier domaine, l'intérêt des américains pour l'économie a joué en sa faveur. D'autant que McCain, en commettant l'erreur de déclarer que "les bases de l'économie américaine sont fortes", s'est exposé à de nombreuses critiques. Les républicains souhaitaient défendre un système de décentralisation et de non-intervention étatique qui a prouvé ses limites: les électeurs ne s'y sont pas trompés.
Obama aurait pu voir sa couleur de peau jouer contre lui (c'était souvent l'analyse des médias français), mais le large soutien des afro-américains et le symbole de tolérance à envoyer au monde en ont probablement fait un atout.
Les républicains ont aussi perdu à cause de leurs propres erreurs. Sarah Palin, tout d'abord, qui a d'abord attiré plus d'attention que McCain lui-même, avant de s'avérer être un poids en raison de ses maladresses. Le caractère négatif de la campagne républicaine, avec de nombreuses attaques peu honorables contre Obama ensuite.


Les défis à venir

Obama ne manquera pas de défis. Certaines de ses promesses seront difficiles à tenir. Citons ainsi:
- Le retrait des troupes d'Irak, qui prendra plus d'un mandat à concrétiser.
- La crise économique et les pertes d'emploi qui y seront liées.
- La révolution fiscale en faveur des classes moyennes, qui risque d'être trop coûteuse en période de crise. Certaines voix la déconseillent déjà...
- La gestion de la diplomatie avec la Russie et l'Iran.
- Des réformes conséquentes sur l'assurance-maladie, trop coûteuse pour des millions d'américains (les "working poor").
- La lutte contre le terrorisme, chère aux américains, mais globalement inefficace et responsable de sacrifices en termes de libertés individuelles (comme à Guantanamo).
- La lutte contre le réchauffement climatique, pour laquelle le monde attend désormais (enfin) la coopération américaine.

Heureusement pour lui, il disposera d'une majorité dans les deux chambres du Congrès pour faire face à ces défis.


McCain a reconnu que les Américains souhaitaient un changement conséquent, tout en regrettant sans doute ne pas pouvoir l'incarner. Obama lui a répondu qu'il souhaitait travailler avec lui. En ces temps difficiles pour les Etats-Unis, le nouveau président devra montrer un talent diplomatique digne d'un Roosevelt.

Je me permets aussi de reprendre les mots d'Eric Fottorino du Monde, dans son article "L'homme qu'il faut":
Après avoir par deux fois élu George W. Bush, dans un virage incroyable d'audace, de dynamisme et de foi en ses propres ressources, l'Amérique met ainsi un terme à sa révolution conservatrice faite de dérégulation et de loi sauvage du marché, achevée dans la crise des subprimes et l'écroulement du système financier. Grâce à son charisme et à sa lucidité, Obama s'impose ainsi comme l'homme du moment, l'homme du maintenant de l'Amérique, rejetant brutalement dans un hier sombre le président sortant et John McCain, qui prétendait lui succéder.
Voilà la chance de ce pays, et celle de ses partenaires.


Reste enfin une dernière question, celle qui ne sera pas forcément posée, car elle dérange. Les Etats-Unis ont prouvé que le racisme n'était pas un frein définitif à l'ascension sociale dans leur pays. Et nous, quand pourrons-nous en dire autant?

Obama

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La nouvelle fait déjà les premières pages autour du monde.

Les analyses ne manqueront pas dans les jours et les semaines à venir. En attendant, il convient de considérer ce qui a été -de fait- un raz-de-marée pour le candidat démocrate. Moins de 150 ans après l'abolition de l'esclavage, l'élection d'un président noir aux Etats-Unis restait pour beaucoup de l'ordre de la science-fiction. Plus d'un film le représentait d'ailleurs comme se produisant dans un lointain futur ; il y a encore un certain nombre de mois, personne n'imaginait que cela pourrait se produire pour la seconde élection présidentielle américaine du 21ème siècle.
La rapidité, et plus encore la facilité avec laquelle la barrière raciale a été franchie aux Etats-Unis mérite de faire une pause pour réfléchir aux paradoxes de ce pays. Lorsque Morgan Freeman incarna le président à l'écran il y a une dizaine d'années, cela était déjà vu comme un certain progrès ; il y a moins de vingt ans, les couples interraciaux étaient encore inexistants au petit comme au grand écran.
Aujourd'hui la réalité a dépassé la fiction, et le monde se demande: et si cela allait plus loin? Si Obama avait encore d'autres surprises en réserve?
Les défis seront à la hauteur de sa présidence. Et déjà l'on se surprend à espérer qu'Obama soit encore plus qu'un symbole. Il pourrait être le plus grand président que les Etats-Unis aient jamais connu...

mardi 4 novembre 2008

Demain!

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Avec le décalage horaire, c'est seulement demain que nous aurons les résultats de l'élection américaine en France.

En attendant, les anglophones peuvent consulter cette très jolie carte interactive du New York Times qui donne une bonne idée de l'avance accordée à Obama.

De notre coté de l'Atlantique, l'AFP nous indique que non, cette fois-ci les journalistes ne joueront pas aux devins. Venant de l'AFP quelle ironie...

(pour rappel)

lundi 3 novembre 2008

Le grand mix : la campagne version Youtube

Copié-collé du Monde.fr:



La Terre Promise: un message de Michael Moore

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Et Michael Moore dans tout ça? Evidemment le troublion le plus célèbre des Etats-Unis ne pouvait qu'être pro-Obama. Et pourtant...
Pendant plusieurs années, Moore était proche du candidat Ralph Nader. Nader, cet autre troublion de la politique américaine a longtemps fait campagne pour les droits des consommateurs, avant de se présenter à l'élection présidentielle sous l'étiquette des écologistes en 1996 et 2000. Ce n'est qu'en 2004, alors que Nader ne parvient pas à gagner l'investiture des verts, que Moore soutient un démocrate (John Kerry). Cette année encore, Nader sera candidat (malheureux), et Moore est plus que jamais rangé du coté des démocrates, pour lesquels il ne ménage pas ses efforts: livre sur l'élection, interviews et messages pro-Obama... C'est presque triomphalement que son site web MichaelMoore.com proclame l'arrivée de la "terre promise". Il faut dire que cette fois tous les indicateurs sont au bleu: USA Today, CBS, Gallup... etc, tous les sondages donnent maintenant Obama gagnant, avec une marge non négligeable.

Le dernier message de Moore ne pouvait qu'attirer mon attention:
[...] Nous avons une chance de racheter ce pays, de prouver que nous valons mieux que ça, que ce que Bush a fait de nous.
McCain a raison sur un point: Barack Obama est le sénateur le plus gauchiste du Sénat des Etats-Unis. Plus gauchiste que Ted Kennedy. Quand était la dernière chance que nous avons eue d'envoyer le PLUS gauchiste des sénateurs à la Maison-Blanche? Croyez-moi, cela ne se reproduira pas de notre vivant.
Chaque vote est crucial -- même dans les Etats les plus rouges comme le Texas et l'Alabama; et dans ceux véritablement bleus comme New York, la Californie ou le Michigan. Demain nous devons créer un raz-de-marée électoral qui donnera à Obama un mandat fracassant pour rendre ce pays à nous, le peuple (we, the people).

McCain déjà battu chez les plus jeunes

Depuis 1980 un ensemble d'organisations (NBC, Google ou USA Today notamment) organisent une fausse élection présidentielle à laquelle participent les étudiants trop jeunes pour voter. Les jeunes américains, de l'école primaire jusqu'à l'université, peuvent ainsi exprimer leur préférence politique.

Voir: http://www.nationalmockelection.org

Cette fausse élection n'est pourtant pas si anodine que cela: entre 4 et 6 millions de jeunes américains y participent cette année, et les résultats peuvent être interprétés comme un indicateur des opinions de leurs parents, nettement plus fiable que les sondages.

Or donc, si les opinions des plus jeunes signifient quelque chose, c'est un véritable raz-de-marée démocrate qui va envahir les urnes:

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De la théorie de l'information...

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La théorie de l'information, qui trouve entre autres son origine dans les travaux de Claude Shannon connaît parfois quelques bugs.

Cette théorie traite notamment de probabilités: si plusieurs dénouements sont possibles pour un même événement, les spécialistes de l'information vont avoir tendance à considérer le plus probable.
En pratique, ceci conduit les grands journaux à préparer leur "une" 24h -voir plusieurs jours- avant les événements qu'ils sont censés rapporter.

On se souvient de l'annonce par FoxNews en 2000 de la victoire de Bush avant même que les derniers votes soient pris en compte. L'annonce avait été reprise par les plus grandes chaînes de télévision américaines, plaçant les démocrates dans la position difficile de devoir défendre a posteriori le résultat réel de l'élection.

Le Monde a ainsi pris le parti d'assumer ce fait bien connu en proposant dés aujourd'hui un numéro électronique daté du 4 novembre. En revanche, l'Agence France Presse (AFP) a sans doute publié de manière prématurée cet article du 2 novembre qui donne déjà Obama vainqueur:

CARACAS (AFP) — La victoire présidentielle du démocrate américain Barack Obama fait naître l'espoir en Amérique latine de relations apaisées avec le puissant voisin du nord, alors que le sentiment anti-américain s'y est accentué face à l'unilatéralisme de l'administration de George W. Bush.


De nos jours les journalistes s'improvisent devins... Espérons qu'ils soient plus doués que dans Astérix.

dimanche 2 novembre 2008

La question du collège électoral

On l'a vu récemment, les Etats n'ont pas le même poids dans l'élection présidentielle. Puisque certains Etats ont plus de grands électeurs que d'autres, cela signifie que l'élection se joue en fait essentiellement sur les Etats les plus peuplés, les autres n'étant là que montrer l'ampleur -ou à l'inverse la faible marge- d'une victoire. Le poids des électeurs individuellement en revanche est inversement proportionnel à l'importance de leur Etat.

Explication: à supposer que la Californie vote à majorité pour le candidat républicain, ses 55 grands électeurs seront considérés comme votant McCain. Pour autant, les 38 millions de californiens ne seront pas républicains ; même si la Californie votait à 60% pour les républicains, il resterait encore plus de 15 millions de démocrates dont le vote perdrait toute sa valeur.
C'est ainsi qu'un président peut très bien gagner le vote dit "populaire", en ayant une majorité des votes des américains, mais perdre l'élection à travers le mécanisme du collège électoral.

Une conséquence moins remarquée du mécanisme est la façon dont le vote minoritaire perd toute sa valeur dans chaque Etat. Plus un Etat est peuplé, et plus grand est le nombre d'électeurs affectés ; un électeur californien a donc in fine moins d'influence qu'un électeur du Wyoming.

Voici une carte du New York Times montrant l'influence réelle des électeurs pour chaque Etat ; on y voit à quel point les électeurs des Etats faiblement peuplés se voient mieux représentés par le collège électoral.
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L'agenda secret de Barack Obama

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Essayons d’imaginer ce que cette élection va changer. Nous sommes le soir du 4 novembre, et Obama est donné gagnant. Le monde attend les décisions du nouvel homme le plus puissant au monde.
Vraisemblablement il ne se passe rien, ou en tout cas pas grand chose. En vérité le pouvoir du président Obama est limité par le Congrès. Il parvient à passer quelques mesures pour améliorer les services sociaux, mais leur application est largement retardée par l’administration. Il utilise sa popularité pour user et abuser de diplomatie à l’étranger, mais la crise économique l’empêche d’appliquer un programme vraiment démocrate.

Pourtant, aux yeux de bien des américains, Obama représente bien plus qu’un vote pour le parti démocrate. Ils votent pour un homme, et voient dans sa couleur de peau le symbole de la diversité et de la tolérance. Pour eux, Obama n’est pas simplement le candidat démocrate le plus prometteur, il représente une rupture avec les politiciens auxquels ils sont habitués. Ils espèrent que le nouveau président gouvernera de manière plus humaine, qu’il oeuvrera pour le citoyen ordinaire plutôt que pour le riche entrepreneur. Dans leur optique, Obama est conscient de sa mission, et ses discours ne sont pas que de la rhétorique destinée à gagner des voix, mais bien l’annonce d’un programme ambitieux qui changera durablement les Etats-Unis. Le soutien sans précédent dont il dispose auprès des personnalités du show-business (Oprah Winfrey, George Clooney, Sharon Stone ou Will Smith sont des partisans d’Obama) est aussi du à l’espoir d’un renouveau complet de la politique américaine.
Après le 11 septembre et l’Irak, ce désir de changement est bien compréhensible. Même si on les dit mal éduqués, la plupart des américains ne sont pas dupes : ils savent que leur pays a depuis un certain nombre d’années succombé à la tentation de l’impérialisme. Ils savent que l’armée américaine n’a pas pour rôle de faire la police à Baghdad ou à Kaboul. Après le traumatisme du Vietnam pour leurs parents, les américains d’aujourd’hui comprennent mieux que jamais que la suprématie américaine ne va pas de soi, et que la défendre à tout prix aura des conséquences durables sur leurs vies. Ils souhaitent donc un président qui ne recherche pas la grandeur par la force, mais pour les idées qu’il incarne. Pour eux, qui de mieux qu’un Barack Obama ?

Ainsi, Obama peut véritablement « changer le monde », puisqu’il réssuscitera les idéaux chers aux américains. Il représente l’homme ordinaire, issu d’une minorité mais parvenu au sommet du pouvoir par son mérite. Son histoire personnelle contribue à en faire un président universel, ses prises de position en faveur d’une répartition plus juste des impôts le président de la majorité, et son opposition à la guerre en Irak un pacifiste mesuré. Pour la plupart de ses supporters, Obama ne peut donc se contenter de retirer les troupes d’Irak ou de protéger l’environnement, il doit avoir un plan pour mener à bien des changements profonds. Cet agenda secret (« hidden agenda ») n’est pas un plan machiavélique pour ranimer le socialisme ou l’anarchisme comme les conservateurs aiment à le faire croire, mais bien un ensemble de réformes, comme la « Great Society » de Lyndon Johnson, qui apportera plus de justice sociale aux Etats-Unis, permettant ainsi aux déçus de l'administration Bush d'être à nouveau fiers de leur pays. Obama peut et doit être un grand président : sa couleur de peau l’exige.

Obama est donc, et c’est paradoxal, prisonnier de son image même dans son propre camp. Il sera toujours un homme noir dirigeant le pays, et symbolisera donc le progrès. Son élection marque un tournant dans l’histoire des Etats-Unis, qui plus que jamais peuvent incarner le rêve de l’universalité ; il y a eu Washington, Kennedy et les Roosevelt, il y aura maintenant Obama. Qu’importe à quoi ressemblera de facto sa présidence : elle est déjà une légende.

La campagne du sénateur de l’Illinois ne s’y est jamais trompée : le faste et la démesure sont à la hauteur de ses promesses ; il est destiné non pas à être un King, mais un empereur. Comme candidat il a déjà prouvé qu’il était le meilleur ; reste, s’il est élu, à être à la hauteur des espoirs qu’il suscite.

Discours d'Obama lors de la convention démocrate:

vendredi 31 octobre 2008

Un peu de musique dans un monde...

Le suspense des élections n'a plus que quelques jours devant lui, rappelons rapidement comment ça marche.

L'élection présidentielle américaine est indirecte. Les citoyens des Etats-Unis élisent des grands électeurs en fonction des préférences et affiliations de ceux-ci, et ce sont eux qui voteront pour élire le président. En d'autres termes les américains favorables à Obama vont élire des grands électeurs ayant promis de voter pour lui.

En règle générale, les grands électeurs sont issus des partis présentant un candidat. Ce système bien particulier a été instauré car les pères fondateurs se méfiaient de la population. Cela ne s'invente pas: les rédacteurs de la Constitution ne souhaitaient pas que le peuple puisse avoir un contrôle direct sur la désignation de l'exécutif. L'élection indirecte est donc un moyen de s'assurer que seuls les candidats des partis majeurs puissent être élus.

Chaque état a autant de grands électeurs que de représentants et de sénateurs. Or, le nombre de représentants d'un état étant proportionnel à sa population, certains états auront donc plus de grands électeurs que d'autres.

Voici une carte donnant le nombre de grands électeurs pour chaque état ; à l'évidence certains état sont bien plus importants que d'autres.
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Et comme prévu, un peu de musique issue de YouTube, avec les contributions musicales de Will.I.am (des Black Eyed Peas) assisté notamment de Scarlett Johansson.

Le premier clip reprend les paroles de Barack Obama lors d'un discours de campagne dans le New Hampshire en janvier de cette année. Le slogan "yes we can", est ici repris par un ensemble d'artistes montrant leur soutien au candidat démocrate. Le Monde Diplomatique nous donne une traduction des premières paroles que j'ai complété:

« Ce credo était inscrit dans les documents fondateurs qui déclaraient la destinée d’un pays.

« Oui, nous pouvons.

« Il a été murmuré par les esclaves et les abolitionnistes ouvrant une voie de lumière vers la liberté dans la plus ténébreuse des nuits.

« Oui, nous pouvons.

« Il a été chanté par les immigrants qui quittaient de lointains rivages et par les pionniers qui progressaient vers l’ouest en dépit d’une nature impitoyable.

« Oui, nous pouvons.

« Ce fut l’appel des ouvriers qui se syndiquaient ; des femmes qui luttaient pour le droit de vote ; d’un président qui fit de la Lune notre nouvelle frontière ; et d’un King [NDLR : en anglais, un roi, mais dans le cas d’espèce il s’agit de Martin Luther King] qui nous a conduits au sommet de la montagne et nous a montré le chemin de la Terre promise.

« Oui, nous pouvons la justice et l’égalité. Oui, nous pouvons les opportunités et la prospérité. Oui, nous pouvons guérir cette nation. Oui, nous pouvons réparer ce monde.

« Oui, nous pouvons. »

« Nous savons que la bataille qui s’annonce sera longue, mais souvenons-nous que quels que soient les obstacles qui se dressent sur notre chemin, rien ne peut arrêter le pouvoir de millions de voix appelant au changement. »

« Nous voulons le changement.

« Un chœur de cyniques nous a dit que nous ne pouvions pas accomplir cela… ils se feront simplement plus bruyants et plus dissonants. On nous a demandé de faire une pause et de regarder la réalité en face. On nous a mis en garde contre le fait d’offrir de faux espoirs au peuple de cette nation.
Mais dans cette histoire improbable qu’est l’Amérique, il n’y jamais eu quoi que ce soit de faux à propos de l’espoir. »

« Je veux le changement. »

« Aujourd’hui les espoirs de la petite fille qui va à une école décrépie à Dillon sont les mêmes que les rêves du garçon qui apprend dans les rues de « LA » (NdT : Los Angeles) ; nous voulons nous rappeler qu’il y a quelque chose qui se produit en Amérique ; que nous ne sommes pas aussi divisés que nos politiques le suggèrent ; que nous sommes un peuple, que nous sommes une nation, et ensemble, nous commencerons le prochain grand chapitre de l’histoire américaine avec trois mots qui résonneront de côte à côte, de la mer à la mer luisante : si, nous pouvons. »





La deuxième vidéo est plus simple à comprendre... et un peu plus extrême en un sens, je vous laisse en juger:

lundi 27 octobre 2008

Mais qui sont... les néo-cons?

On a parfois un peu de mal à comprendre pourquoi autant d'Américains souhaitent voter McCain. Dans son article du jour, William Kristol dit qu'il est temps de passer au "coeur de la question", et de "rappeler aux Américains qu'ils n'élisent pas un super-ministre des finances ou un très haut fonctionnaire aux services sociaux et sanitaires, mais un commandant-en-chef des armées en temps de guerre".

On serait tenter de demander "mais quelle guerre?". L'argument belliciste peut surprendre pour qui ne connaît pas les Kristol, cette grande famille de néo-conservateurs. Le père, Irving Kristol, fut à l'origine du mouvement dans les années 60, notamment en fondant le magazine The Public Interest. Le fils, William Kristol, fonda le magazine The Weekly Standard.

La plupart des néo-conservateurs étaient à l’origine des démocrates désireux de s’opposer vigoureusement l’Union Soviétique sur la scène internationale. En 1947 avec le groupe Americans for Democratic Action puis en 1950 dans le Committee of Present Danger, ces politiciens et ces intellectuels affirment leur engagement contre le communisme. Ils considèrent que les Etats-Unis ont une responsabilité morale à promouvoir le libéralisme occidental à travers le monde, et qu’il est nécessaire d’aller plus loin que la simple politique d’endiguement (containment). Ceux-ci apportent progressivement leur soutien aux candidats à la présidence républicains, à commencer par Irving Kristol avec Nixon en 1972. André Kaspi dit d’eux qu’ils « […] viennent de l’extrême gauche qui a combattu le stalinisme au nom du trotskisme, puis s’est ralliée au parti démocrate avant de rejoindre les républicains de Ronald Reagan. » . En 1976, ces « nouveaux conservateurs » sont finalement surnommés « néo-conservateurs » , puis « neo-cons ». Plusieurs d’entre eux deviennent membres de l’administration Reagan et se distinguent par leurs prises de position radicales vis-à-vis de l’Union Soviétique . Ceux-ci sont donc pris par surprise par la Glasnost de Mikhail Gorbatchev qui laisse les Etats-Unis sans opposition idéologique.
Cette absence d’adversaire à la taille des Etats-Unis conduit d’ailleurs l’historien Francis Fukuyama à s’interroger sur une possible « fin de l’histoire » par le succès de la démocratie libérale . Mais les néo-conservateurs demeurent divisés sur la politique étrangère américaine. Certains pensent qu’il est temps désormais de se consacrer à la politique intérieure, comme Jeanne Kirkpatrick qui déclare qu’il « n’y a pas de mission mystique américaine ou de but qui puisse obliger les Etats-Unis à essayer de répandre la démocratie dans le monde » . Seule une minorité souhaite continuer à utiliser l’influence américaine pour policer le monde. Ainsi le journaliste Charles Krauthammer va jusqu’à dire que « si les Etats-Unis n’agissent pas, personne ne le fera » . En 1997, les néo-conservateurs partisans de la suprématie américaine se rassemblent pour fonder le Project for a New American Century qui cherche à promouvoir les intérêts et le leadership américain ; le président du PNAC sera... William Kristol.

On comprend donc mieux pourquoi un Kristol peut insister sur les qualités de commandant-en-chef des armées pour un candidat à la présidence, plutôt que sur ses qualités de gestionnaire de fonds publics, et ce même en pleine crise économique. Pour les "neo-cons", la suprématie américaine doit être préservée, et ce quel qu'en soit... le prix.
Espérons que les électeurs auront autre chose en tête que la domination du monde...

mercredi 22 octobre 2008

"On ne peut exclure une victoire de McCain"

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Les chances d'un retour de McCain sont a priori minces. Les médias français se plaisent à rappeler que sa couleur de peau peut encore porter préjudice à Obama, mais son avance semble suffisante pour lui assurer la victoire.
Pourtant, rien n'est jamais gagné en politique. On cite la victoire surprise de Harry Truman en 1948 ou celle de Ronald Reagan en 1980.
Le cas le plus pertinent reste celui de Tom Bradley, candidat au poste de gouverneur de Californie, et donné vainqueur à l'époque par tous les sondages... qui perdit l'élection à cause de sa couleur de peau, un facteur sous-estimé par les sondages.
Obama pourrait donc perdre lui aussi à cause de sa noirceur? Mais dans ce cas, n'est-ce pas dire que cette élection sera la mesure du racisme aux Etats-Unis?

Le 4 novembre nous saurons si les américains ont tourné la page ouverte par Lincoln...

lundi 20 octobre 2008

Le vent tourne pour Obama

Le vent souffle dans le sens d'Obama ces jours-ci. Lui qui a commencé la campagne comme outsider et a du batailler ferme contre les Clinton se trouve aujourd'hui (à deux semaines de l'élection) dans une position de favori.
Sa campagne enregistre des dons record: 150 millions de dollars en septembre, peut-être plus encore en octobre! Cet argent lui permet de financer des spots publicitaires longs et coûteux, et donc de battre les républicains à leur propre jeu, c'est à dire celui qui a le plus de moyens...
De fait, le vent tourne aux Etats-Unis, et la campagne républicaine, à l'image de son candidat, semble à bout de souffle. Pas seulement sur la forme, puisque les attaques répétées sur Obama le qualifiant de socialiste, d'anarchiste, de terroriste, ou plus simplement d'homme susceptible d'augmenter les impôts pour les "pauvres gens", ne prennent plus.
De fait, comme l'analyse Paul Krugman, le journaliste du New York Times récemment nobelisé en économie pour ses théories néo-keynesiennes, le paradigme républicain ne fonctionne plus. Le paradigme républicain c'est quoi? C'est le tour de force réussi par Nixon, puis Reagan, de faire croire que le parti républicain était celui des "pauvres gens", de l'américain moyen ("Joe le plombier") qui travaille dur et qui se fait voler le fruit de son labeur par les impôts d'un état fédéral dirigé par des démocrates élitistes et condescendants. Mais il semble plus difficile de faire passer un Obama pour élitiste qu'un Kerry, et les tentatives de faire passer McCain comme un "homme du peuple" échouent les uns après les autres. Peut-être les sept maisons et les treize voitures du candidat républicain y sont-elles pour quelque chose...
Il était temps que les américains se réveillent. Ce n'est plus seulement les gauchistes à-la-Krugman qui voient dans les républicains des ploutocrates finis, mais également une partie des républicains eux-mêmes: le soutien surprise du jour de Colin Powell à Obama en est la preuve.

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Powell trouve que son parti est devenu "trop conservateur" sous W.Bush. et se dit "inquiet" de la direction prise ces dernières années. Le prochain président dit-il devra "améliorer la réputation que nous avons laissée au reste du monde". De là à dire que la politique extérieure de "W" a attiré l'anti-américanisme comme la Louisiane attire les ouragans il n'y a qu'un pas...
Mais ce soutien de Powell aurait sans doute moins de portée si celui-ci n'était pas un indécrottable républicain à la base. Lui qui a servi sous Reagan (comme conseiller à la sécurité) et sous Bush (comme secrétaire d'état) est un ami personnel de McCain et l'année dernière encore lui a versé plus de 2000$ pour sa campagne. Alors quoi, qu'est-ce qui a changé pour qu'un Powell décide enfin que les républicains sont allés trop loin? Comment se fait-il que l'homme qui s'est opposé autrefois à la discrimination positive au nom du respect de soi a-t-il pu en venir à croire que les démocrates étaient meilleurs pour l'avenir des Etats-Unis?
Il faut croire que le vent tourne, et qu'il apporte de l'espoir...



"Cela pourrait arriver à n'importe qui... l'espoir."

jeudi 16 octobre 2008

Talk to your parents about McCain

Une autre vidéo dans le même genre que la précédente... hilarant si vous comprenez bien l'anglais.




Pour les non-spécialistes...
- Le slogan sur la casquette "Drill baby, drill" est celui de Sarah Palin pour cautionner les forages pétroliers en Alaska. A l'évidence, toute personne portant une telle casquette va voter républicain.
- Le clip est en fait une parodie des clips anti-drogue : "Juste parce que d'autres personnes de votre âge le font ne veut pas dire que c'est cool" évoque à la base la consommation de cannabis, assez répandue chez les jeunes américains. "Voter républicain, ne serait-ce qu'une seule fois, peut avoir des conséquences désastreuses qui dureront des années. Vous ne risquez pas seulement votre futur, vous risquez aussi le mien." évoque la prise de drogues dures. Je vous laisse deviner ce que la casquette symbolise...

Une héroïne pour McCain... ou pas tant que ça...

Ce petit clip sur la campagne présidentielle américaine montre Hayden Panettiere, qui incarne l'indestructible Claire Bennet dans la série Heroes. Elle nous explique ici pourquoi il faut voter McCain... ou pas.




Petit extrait pour les non-anglicistes:
« Il y a trois choses que je pense que tous les citoyens devraient faire : fumer des cigarettes, voter pour McCain et ne pas attacher leur ceinture. Un vote pour McCain est un vote contre le changement. Il conservera les réductions d’impôts pour les riches, commencera une nouvelle guerre et on va tous probablement mourir. Il est juste comme George Bush, sauf qu’il est plus vieux et qu’il a encore plus sale caractère. »

mardi 7 octobre 2008

Dans la peau de George W. Bush

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Après Jacques Chirac, Karl Zero s'attaque maintenant à "W"! "Dans la peau de George W. Bush" sortira le 8 octobre en salle.
Le Monde, dans cet article, juge déjà le film comme une critique facile d'un homme déjà fini, un "tir sur l'ambulance".
Une critique facile donc? Peut-être. Mais voir ou revoir la catastrophe que fut l'administration Bush arrivera toujours à nous amuser autant... ou nous terrifier.

Being W : le site officiel.

lundi 6 octobre 2008

Obama gagnerait... aujourd'hui!

Allez c'est une nouvelle suffisamment bonne pour être saluée. Selon l'article du jour dans Le Monde, Obama remportait la présidence si les élections avaient lieu aujourd'hui.

Pendant ce temps, le New York Times publie une rétrospective étonnante sur la taille et le poids des différents candidats à la présidence, indiquant que le candidat le plus grand et/ou le plus gras a tendance à gagner *!* Dans ce cas, Obama aurait 90% de chances d'être élu puisqu'il est largement plus grand (1m85 quand même) et légèrement plus lourd que McCain. Nous voila rassurés!
En tout cas cela aura le mérite de nous avoir rappelé qu'aux Etats-Unis aussi les gens sont de plus en plus grands: la taille moyenne des présidents américains semble gagner environ 10cm par siècle. L'exception reste ce géant d'Abraham Lincoln avec son 1m93, exceptionnel pour l'époque!
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dimanche 28 septembre 2008

La Présidence Impériale: Introduction

La présidence impériale, qu'est-ce que c'est? A la base, il s'agit d'une expression popularisée par l'historien Arthur M. Schlesinger pour décrire une tendance en politique institutionnelle: le président américain tend à s'attribuer plus de pouvoir qu'il ne le devrait. Ce faisant, il devient un président "impérial" car affranchi des systèmes de contrôle conçus dans la Constitution.
En d'autres termes, la "présidence impériale" désigne un déséquilibre institutionnel, qui sera principalement visible en politique étrangère, mais pas seulement. Ce déséquilibre n'est pas décrié par tous: pour les conservateurs américains il s'agit parfois d'une évolution souhaitable, voir même voulue par les pères fondateurs. Le pouvoir accru du président permet ainsi de mettre en place plus facilement des politiques qui pourraient être opposées par le Congrès.

Cette présidence impériale était surtout le fait des Roosevelt ou de Nixon ; au lendemain des attaques du 11 septembre 2001, les Etats-Unis entrent en guerre contre le terrorisme. George W. Bush devient alors le dernier des « war presidents ». Sous ses ordres, les Etats-Unis interviennent en Afghanistan en octobre. Dans le même temps, son Département de la Justice fait voter le USA Patriot Act pour mieux protéger le territoire américain; les personnes suspectées de terrorisme sont emprisonnées en complète violation de la plupart de leurs droits civiques; certains se voient refuser tout droit -y compris le statut de prisonnier de guerre protégé par la Convention de Genève- et sont détenus indéfiniment dans des prisons militaires comme sur la base de Guantanamo Bay à Cuba. Le combat contre le terrorisme s’étend à toute la politique étrangère américaine. Dans son discours sur l’Etat de l’Union 2002 , Bush décrit un « axe du mal » (axis of evil) constitués de pays hostiles et de leurs alliés terroristes . La cible privilégiée de l’administration Bush est l’Irak, accusée de posséder des armes de destruction massive et d’entretenir des liens avec le réseau terroriste al Qaida. En mars 2003, malgré une forte opposition de l’opinion publique mondiale et d’un grand nombre de leurs alliés, les Etats-Unis attaquent l’Irak et écrasent l’armée du dictateur Saddam Hussein.
Les politiques de Bush inquiètent, surtout à l’étranger. Le président n’a-t-il pas outrepassé ses droits tant au regard des lois internationales que des lois américaines ? N’existe-t-il donc aucun contrepoids dans les institutions américaines qui puisse l’arrêter ?
Le groupe des « néo-conservateurs » (neoconservatives) au sein de l’administration Bush est montré du doigt, accusé de préparer une domination américaine sans concessions sur le monde, de vouloir imposer leur idéologie à tous les peuples de la planète. Le président américain est décrié comme un homme dangereux, analphabète, fanatique religieux, ou encore marionnette au service du complexe militaro-industriel. L’exécutif semble hors de contrôle. Le prestige américain s’effondre. Un sondage effectué en 2003 par Time Magazine révèle que plus de 80 % des européens estiment que les Etats-Unis sont le pays qui pose le plus grand danger à la paix mondiale .
Pour un pays aussi désireux de préserver les libertés individuelles, le droit international et l’équilibre institutionnel, la nouvelle face de l’administration américaine a de quoi surprendre. Pourtant, la réalité est plus complexe. Le traumatisme des attentats du 11 septembre, (« 9/11 » en abrégé) est profond. Les américains ont découvert qu’une partie du monde déteste leur empire. Leur quête de sécurité passe par une réaction très forte, presque démesurée. Bush n’est pas un élément hors de contrôle; il agit avec le soutien du Congrès et de l’opinion. Ses politiques de protection du territoire, qui en matière de politique étrangère se traduisent par l’assertion d’une doctrine de préemption face aux menaces potentielles , sont approuvées par la majorité des américains. A bien y réfléchir, ce n’est pas la première fois qu’un président américain prend de telles initiatives; on se souvient des Roosevelt, de Truman ou de Nixon. De plus, des critiques sont apparues à l’intérieur même des Etats-Unis. Le Patriot Act et les ordres exécutifs (executive orders) qui l’accompagnent sont décrits comme liberticides. Les associations de protection des libertés individuelles, en particulier l’American Civil Liberties Union (ACLU), s’insurgent. La Cour suprême, dans Hamdi V. Rumsfeld (2004), rappelle l’exécutif à l’ordre : « un état de guerre n'est pas un chèque en blanc pour le président quand il s'agit des droits des citoyens de ce pays » . Mais les voix sont plus faibles pour dénoncer l’invasion de l’Irak. Pourtant, aucune arme de destruction massive n’a été trouvée, et les liens entre al Qaida et Saddam Hussein se révèlent être une invention de l’administration Bush pour justifier l’attaque dans le cadre de sa guerre contre le terrorisme. Les américains jouent de patriotisme, soutiennent les troupes engagées dans le conflit, et –en dépit de tout- réélisent leur président en 2004.
Cette domination présidentielle acceptée de la politique étrangère a de quoi étonner. Les Etats-Unis n’ont-ils pas été fondés dans l’opposition au monarchisme parlementaire anglais ? Comment le président peut-il avoir autant de puissance ? Le 21ème siècle semble se placer sous le signe de l’oppression du géant américain; après tout, pour reprendre André Kaspi : « l’Union Soviétique n’existe plus. Les Etats-Unis restent la seule superpuissance. Leur force et leur influence sont sans égales dans le monde ». Dans ce contexte, il faut parfois un empereur pour un empire. Le 11 septembre n'a été qu'une occasion de plus de réveiller le spectre de l'impérialisme à l'américaine.

samedi 27 septembre 2008

How We Became the United States of France

Une collègue a posté cet article sur facebook, j'ai trouvé ça très drôle! Enjoy:
http://www.time.com/time/nation/article/0,8599,1843168,00.html

Sarah Palin

Après une longue absence due notamment au décès de mon ordinateur, je vais à nouveau commenter une note de l'ami Maëster qui décidément fait de fort beaux dessins sur son blog.

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Sarah Palin a donc été désignée par McCain comme sa co-listière, à la surprise générale. Cette jeune inconnue de 44 ans est le gouverneur de l'Alaska et la mère de cinq enfants. Mais surtout c'est une républicaine convaincue, et ses prises de position ont de quoi faire sourire en France.
Pour commencer c'est une fervente opposante à l'avortement en toutes circonstances, qui n'hésite pas à mettre en pratique ses propres convictions, puisque son plus jeune enfant est atteint de trisomie, et sa fille de 17 ans, récemment tombée enceinte, doit se marier prochainement (sa mère ayant réduit le budget d'un programme venant en aide aux mères adolescentes, il est vrai qu'il vaut mieux qu'elle ne compte pas trop sur les aides sociales). Membre de la National Rifle Association, elle est connue pour aimer la chasse et les armes à feu. En bonne conservatrice, elle prêche l'abstinence avant le mariage, qu'elle estime préférable aux cours d'éducation sexuelle. Enfin elle met en avant sa ferveur religieuse, qu'elle exprime entre autres par un soutien au créationisme, à la peine de mort (dent pour dent) et une opposition au mariage homosexuel.
Pour McCain cette jeune femme qui ne mâche pas ses mots envers Obama est l'occasion de flatter à la fois son électorat évangéliste et les femmes déçues par l'échec d'Hillary Clinton, mais c'est aussi un pari risqué: ancienne reine de beauté, son inexpérience flagrante en politique étrangère (elle a eu son premier passeport en 2006) est encore plus criante que celle d'Obama... et prétendre à la télévision que la proximité géographique de la Russie et du Canada ait pu lui apporter les connaissances nécessaires est au mieux ridicule. De plus, elle est déjà accusée de plusieurs associations et actes douteux: corruption, abus d'influence et l'obtention d'un budget fédéral de 27 millions de dollars lorsqu'elle était maire de la ville de Wasilla, une ville de... 9000 habitants. Pour une opposante du "big government", cet usage abusif de l'argent du contribuable est pour le moins curieux.
Enfin, et paradoxalement, si Palin a ses faiblesses, elle n'en plaît pas moins aux électeurs avoués de McCain. Un peu trop même, puisqu'elle a parfois fait de l'ombre au candidat dans certaines conventions républicaines. Sa jeunesse contraste d'autant plus avec les 72 ans de son aîné, dont le cancer de la peau laisse planer des doutes sur sa bonne santé physique. Trop jeune et trop dynamique peut-être, Sarah Palin aurait un rôle (trop?) important à jouer en cas de victoire républicaine, puisque McCain risque de manquer d'énergie pour assumer la charge de la présidence.

De son coté, Obama a choisi Joe Biden, un "vieux de la vieille" et président du comité des affaires étrangères du Sénat, coupant ainsi l'herbe sous le pied à ceux qui le trouvaient trop "inexpérimenté" justement.

Les candidats ayant utilisé leurs co-listiers pour effacer leurs faiblesses, l'élection risque d'être plus serrée que jamais.

mercredi 20 août 2008

Vers une nouvelle Guerre Froide?

Suite à l'invasion de la Géorgie par la Russie, une question récurrente se pose chez les spécialistes occidentaux: la Guerre Froide s'est-elle vraiment terminée?

Les contributions du jour dans le New York Times laissent à penser que non.

Thomas Friedman, le multi-pullitzer-isé rappelle avec pertinence que la stratégie américaine à la suite de l'effondrement de l'Union Soviétique reposait largement sur un élargissement de l'OTAN jusqu'aux portes de la Russie. Autrement dit, il s'agissait de contenir la Russie de la même façon que l'on avait contenu l'Union Soviétique.
De son coté, Gorbachev en personne rappelle que les Etats-Unis ont continuellement traité la Russie avec condescendance: en soutenant l'indépendance du Kosovo, en abrogeant le traité ABM (anti-missiles balistiques) ou (justement) en élargissant l'OTAN, sans que la Russie puisse elle-même y adhérer.
Dans un tel contexte, le fait que la Russie puisse utiliser sa force militaire pour défendre ses intérêts n'est guère surprenant. Après tout, les intérêts russes sont largement ignorés par les américains. Le dédain affiché de Poutine pour les lois ou les institutions internationales n'est que le reflet de celui de W.Bush et des conservateurs américains en général.

Image hébergée par servimg.comDessin de Maester. Retrouvez le sur son blog à l'adresse suivante: http://maester.over-blog.com/


L'ironie dans tout cela est qu'un tel état de fait, loin de desservir les conservateurs de tous poils, ne fait qu'augmenter leur popularité. N'a-t-il pas été dit qu'une nouvelle attaque terroriste offrirait la présidence américaine sur un plateau à McCain? A défaut, comme le dessine Maester, une petite Guerre Froide marche aussi.

mardi 19 août 2008

John McCain

Après ce bref silence pendant mes vacances dans le sud, j'ai décidé de vous faire un petit article sur cet illustre inconnu: John McCain.

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Avec la obamania dont est saisie l'Europe, on oublie (encore et encore) que l'élection est encore loin d'être gagnée pour les démocrates. Fort heureusement, une petite série d'articles sur McCain dans le New York Times permet de mieux cerner le personnage.

Alors qui est John McCain? A 72 ans, ce vénérable sénateur se présente volontiers comme un conservateur traditionnel. De notre coté de l'atlantique, il serait aisé de le voir comme un personnage plus raisonnable que W.Bush, moins extrême quant à l'implication américaine au Moyen-Orient et plus éloigné du lobby pétrolier.

Il n'en est rien.

S'il y a une chose à retenir de John McCain, c'est qu'il est parfaitement dans la continuité de W.Bush, qui l'a d'ailleurs devancé à l'investiture républicaine de l'an 2000. En bon républicain, il est hostile à l'avortement ou au mariage homosexuel. Il soutient fermement le second amendement (le droit de posséder les armes à feu) et la peine de mort. Après s'être récemment prononcé en faveur de la prospection pétrolière au pôle nord, il a reçu un soutien financier colossal de la part des industries pétrolières. Ce qui ne l'empêche pas d'être lui-même très riche: sa femme est (entre autres) la présidente de Budweiser.

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On aurait pu espérer que les républicains se seraient distancés des politiques désastreuses de l'administration Bush. Mais McCain a toujours été le premier à soutenir l'interventionisme américain au lendemain de 9/11. De fait, en septembre 2001 il était un des sénateurs les plus médiatisés car il appelait les Etats-Unis à riposter contre tous les pays potentiellement alliés aux terroristes d'Al Qaida, notamment l'Irak, l'Iran et la Syrie. Il a constamment soutenu l'invasion de l'Irak et la destitution de Saddam Hussein. Loin d'être distant des néo-conservateurs, il affirmait après l'élection de W. Bush qu'il aurait également choisi Dick Cheney comme vice-président. Interrogé récemment sur sa définition du "mal", et la façon de le confronter, McCain continue à parler de l'islamisme et à rendre hommage aux soldats américains actuellement sous les drapeaux. A titre de comparaison, Obama préfère parler du "mal" fait avec "de bonnes intentions", une façon prudente de condamner l'aventurisme militaire.

Connu pour son tempérament un tantinet sanguin, McCain est un homme qui n'a pas peur d'utiliser la force militaire pour défendre les intérêts américains. N'a-t-il pas mentionné qu'il lui paraissait envisageable d'utiliser l'arme atomique contre l'Iran? Mais au fond du fond ce qui est le plus remarquable chez John McCain, c'est encore qu'il talonne Obama dans les sondages. Après tout, être candidat à la Maison Blanche quand on est noir, ce n'est pas encore une partie de plaisir...