lundi 27 octobre 2008

Mais qui sont... les néo-cons?

On a parfois un peu de mal à comprendre pourquoi autant d'Américains souhaitent voter McCain. Dans son article du jour, William Kristol dit qu'il est temps de passer au "coeur de la question", et de "rappeler aux Américains qu'ils n'élisent pas un super-ministre des finances ou un très haut fonctionnaire aux services sociaux et sanitaires, mais un commandant-en-chef des armées en temps de guerre".

On serait tenter de demander "mais quelle guerre?". L'argument belliciste peut surprendre pour qui ne connaît pas les Kristol, cette grande famille de néo-conservateurs. Le père, Irving Kristol, fut à l'origine du mouvement dans les années 60, notamment en fondant le magazine The Public Interest. Le fils, William Kristol, fonda le magazine The Weekly Standard.

La plupart des néo-conservateurs étaient à l’origine des démocrates désireux de s’opposer vigoureusement l’Union Soviétique sur la scène internationale. En 1947 avec le groupe Americans for Democratic Action puis en 1950 dans le Committee of Present Danger, ces politiciens et ces intellectuels affirment leur engagement contre le communisme. Ils considèrent que les Etats-Unis ont une responsabilité morale à promouvoir le libéralisme occidental à travers le monde, et qu’il est nécessaire d’aller plus loin que la simple politique d’endiguement (containment). Ceux-ci apportent progressivement leur soutien aux candidats à la présidence républicains, à commencer par Irving Kristol avec Nixon en 1972. André Kaspi dit d’eux qu’ils « […] viennent de l’extrême gauche qui a combattu le stalinisme au nom du trotskisme, puis s’est ralliée au parti démocrate avant de rejoindre les républicains de Ronald Reagan. » . En 1976, ces « nouveaux conservateurs » sont finalement surnommés « néo-conservateurs » , puis « neo-cons ». Plusieurs d’entre eux deviennent membres de l’administration Reagan et se distinguent par leurs prises de position radicales vis-à-vis de l’Union Soviétique . Ceux-ci sont donc pris par surprise par la Glasnost de Mikhail Gorbatchev qui laisse les Etats-Unis sans opposition idéologique.
Cette absence d’adversaire à la taille des Etats-Unis conduit d’ailleurs l’historien Francis Fukuyama à s’interroger sur une possible « fin de l’histoire » par le succès de la démocratie libérale . Mais les néo-conservateurs demeurent divisés sur la politique étrangère américaine. Certains pensent qu’il est temps désormais de se consacrer à la politique intérieure, comme Jeanne Kirkpatrick qui déclare qu’il « n’y a pas de mission mystique américaine ou de but qui puisse obliger les Etats-Unis à essayer de répandre la démocratie dans le monde » . Seule une minorité souhaite continuer à utiliser l’influence américaine pour policer le monde. Ainsi le journaliste Charles Krauthammer va jusqu’à dire que « si les Etats-Unis n’agissent pas, personne ne le fera » . En 1997, les néo-conservateurs partisans de la suprématie américaine se rassemblent pour fonder le Project for a New American Century qui cherche à promouvoir les intérêts et le leadership américain ; le président du PNAC sera... William Kristol.

On comprend donc mieux pourquoi un Kristol peut insister sur les qualités de commandant-en-chef des armées pour un candidat à la présidence, plutôt que sur ses qualités de gestionnaire de fonds publics, et ce même en pleine crise économique. Pour les "neo-cons", la suprématie américaine doit être préservée, et ce quel qu'en soit... le prix.
Espérons que les électeurs auront autre chose en tête que la domination du monde...

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