vendredi 25 juillet 2008

Obama peut-il gagner?

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Selon le New York Times, pas moins de 86% des français souhaitent voir Barack Obama gagner les prochaines présidentielles américaines.

Pour sûr, Obama a le profil idéal. Jeune, noir, partisan du changement, noir, démocrate, noir... Il incarne à la fois la concrétisation du rêve américain avec l'égalité entre les races du mythique melting pot et dans le même temps la possibilité d'une Amérique progressiste, moderne, tolérante. On le compare souvent à John F. Kennedy pour sa jeunesse et l'enthousiasme qu'il suscite. Qu'est-ce qui pourrait bien l'empêcher d'accéder à la présidence et donc de devenir le premier président américain de couleur?

Mais qu'est-ce qui a bien pu empêcher le champion de l'écologie Al Gore de gagner en 2000? Ou l'internationaliste John Kerry en 2004? Pour les français, il est difficile de comprendre que les Etats-Unis ne se limitent pas aux seuls démocrates. La présidentielle de 2008 ne s'est pas jouée entre Hillary Clinton et Barack Obama: elle se joue aujourd'hui entre John McCain et Barack Obama.

S'il est vrai que pour nombre d'américains l'élection du premier noir à leur présidence enverrait un signal fort au reste du monde et permettrait d'effacer la perte de prestige due à l'invasion de l'Irak, pour d'autres il s'agirait d'une catastrophe, dans la mesure ou cela signifierait une victoire conséquente des "liberals".

Explications. Si le libéralisme est en France un principe économique, aux Etats-Unis il est un principe moral. Pour les américains, les libéraux sont les défenseurs de l'avortement ou du mariage homosexuel, des opposants à la peine de mort ou au port d'armes à feu. Ils sont également les champions de l'assistance publique, de la discrimination positive et de l'internationalisme en politique étrangère.
Or, traditionnellement les américains sont des conservateurs religieux, partisans féroces de l'individualisme et d'une implication minimale de l'Etat dans tous les domaines. Un candidat à la présidence ne peut donc se permettre d'être trop libéral... mais un président ne peut pas se le permettre beaucoup plus.

Voila pourquoi non seulement un Barack Obama n'a pas gagné d'avance, mais en plus son élection éventuelle ne serait en rien une révolution pour les Etats-Unis. Si on excepte le domaine de l'image et du discours, un président démocrate aurait essentiellement les mêmes politiques extérieures que celles menées actuellement par l'administration Bush. Pour commencer, un désengagement d'Irak serait très progressif, et une force "d'observation" demeurerait. Quant à l'Afghanistan ou à Israël les positions américaines seraient inchangées.
En revanche, coté économie internationale, une administration démocrate serait plus susceptible d'adopter des politiques protectionnistes, et exigerait des européens qu'ils participent à "l'effort de guerre" contre les talibans et Al Qaida. Peut-être y aurait-il quelque progrès du coté de l'environnement, mais même là, Obama aurait sans doute les mains liées, comme Clinton avant lui. Ce n'est pas encore demain que les Etats-Unis ratifieront Kyôto!

En résumé, on l'oublie souvent, mais cela reste une élection américano-américaine. La récente visite d'Obama en Europe ne témoigne pas d'un intérêt grandissant pour notre continent (il dirige déjà le sous-comité aux affaires européennes du Sénat), mais plutôt d'une envie de capitaliser sur le bienfait qu'il peut apporter à une image américaine ternie par un excès d'impérialisme. Autrement dit, c'est un coup médiatique bien calculé pour montrer aux américains là-bas qu'il est populaire ici.

S'il en est réduit à utiliser sa popularité européenne dans la campagne, Obama est loin d'avoir gagné...

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